Adapter Houellebecq au théâtre… Quand Julien Gosselin a monté Les particules élémentaires au Festival d’Avignon, la proposition n’allait pas de soi. Deux ans plus tard, avec la reprise du spectacle, elle parait à peine plus évidente. Pas pour les mêmes raisons : c’est que Houellebecq, entretemps, dans les circonstances que l’on sait, a pris sa part des polémiques nationales sur la place de l’islam et l’attitude de la République à son égard. Aussi est-ce avec une curiosité renouvelée que l’on revient vers ces Particules élémentaires.
Curiosité artistique bien sûr : comment adapter ce qui est à la fois roman-fleuve, récit philosophique, chronique ironique ? Mais aussi curiosité à l’égard d’un auteur à la fois omniprésent et insaisissable : est-il aussi désenchanté qu’il y parait ? Sa vision de l’homme et du monde est-elle si crépusculaire ?
Bref, voici un spectacle qui resurgit comme neuf. Nimbé, en tout cas, d’une aura inédite. Il n’en avait guère besoin, cela dit. Qui ne le sait, maintenant : pendant quatre heures, Julien Gosselin a réussi la fusion des particules houellebecquiennes dans un mélange de musiques, de textes, de vidéo, de jeu d’acteurs quelque part entre théâtre et opéra rock. Le public d’Avignon s’était levé, chaviré d’enthousiasme. Les deux années qui ont passé ne changent rien à l’affaire : Houellebecq est un grand écrivain et Les Particules élémentaires un grand moment de théâtre.